BENJAMIN KOHEN
CO-FONDATEUR, SABEKO
Qu’il soit en support de ses équipes, qu’il partage son expertise technique pour proposer immédiatement des solutions efficaces, ou prenne plaisir, en tant que directeur commercial, à développer son réseau, Benjamin Kohen est un entrepreneur qui conserve ses réflexes de dépanneur : « J’adore résoudre des casse-têtes. C’est cet aspect qui m’a fait aimer ce métier dès mon premier stage : on arrive, ça coule, qu’est-ce qu’on fait ? On repart, ça ne coule plus et le client est content ! » S’il a passé sa scolarité au plus près du radiateur, c’est en quatrième que le futur plombier-chauffagiste embraye sur cette voie manuelle. Les multiples déplacements, l’adrénaline des interventions d’urgence, les tuyaux à ressouder et les heures accumulées à remplacer éviers, climatiseurs et cumulus ont été à la base de ses sept années d’apprentissage. Toutefois, Benjamin n’a attendu ni les validations académiques ni celles de sa hiérarchie pour entreprendre. En parallèle de l’école et de ses pérégrinations dans de petites boîtes villeurbannaises, c’est à tout juste dix-neuf ans qu’il s’en va opérer solo. Là, Benjamin écoute déjà son besoin de structuration pour que son activité ne parte pas à vau-l’eau : « Tout documenter, tout assurer, tout maîtriser me permet de me sentir en sécurité dans un métier où le moindre accident peut avoir d’importantes répercussions ! »
Son cheminement d’artisan prend une autre ampleur en 2013, lorsque Benjamin répond à une proposition de son grand frère, qui songeait à une reconversion inattendue : « Ça te dit de monter un truc ? » Benjamin le suit, tout en sachant que l’aventure allait forcément commencer par « un choc des cultures ». Classe préparatoire, grande école et expériences à l’étranger, Samuel était davantage promis aux costumes et à la finance plutôt qu’au bleu de travail assorti à sa pince à sertir : « Après une formation accélérée, on est parti ensemble sur les chantiers. C’était le début de Samuel et Benjamin Kohen, le début de Sabeko ! » Démarre alors une période aussi heureuse que besogneuse ; Benjamin ne cesse de répondre à la demande et de recruter. Les copains de promotion seront les premiers à rejoindre les rangs, à apporter leur expertise terrain dans un esprit bon enfant. Les barbecues du vendredi midi et les autres rituels marquent autant de pauses bienvenues avant que les collègues ne repartent de plus belle : « Même si on travaillait déjà énormément, on était plus chez Sabepotes ! » À force d’y croire et à force de croître – « j’ai un faible pour la loi de l’attraction ! » –, les deux frères se répartissent les tâches en back office. À Samuel de concrétiser sa vision pragmatique et ses stratégies structurantes, à Benjamin d’assurer la crédibilité technique et l’accompagnement commercial. L’entreprise dépasse toutes les prévisions en se développant dans les deux Savoie. En une année, les équipes doublent et le chiffre d’affaires aussi : « J’étais abasourdi. J’essayais de comprendre ce qui était en train de se passer ! » Et bien que de tels résultats aient de quoi l’électriser, Benjamin réalise rapidement que l’hypercroissance est difficile à maîtriser. C’est en entrant dans le Programme Pépites que les co-dirigeants trouvent des appuis auprès d’autres entrepreneurs. Grâce à ce recul, ils adaptent sans cesse les moyens et les fonctionnements, et cette ascension entraîne à chaque fois de nouveaux ordonnancements : « Tout ce que l’on imaginait devenait très vite obsolète. Il fallait revoir notre stratégie tous les trois à six mois. Le défi était surtout de concilier cette trajectoire, d’honorer tous nos contrats tout en conservant le bien-être des équipes ! »
Fort de plus de cent-cinquante collaborateurs, Sabeko s’est surtout façonné une réputation en dépoussiérant la plomberie de ses clichés les plus tenaces : « Un métier millénaire ne se réinvente pas, mais nous pouvons changer tout ce qui l’entoure, à commencer par le service client ! » Outre l’amélioration des processus internes et de toute cette gestion que l’artisanat traite aussi parfois de façon artisanale, Benjamin a tenu à ce que son entreprise se démarque à travers l’apprentissage et la transmission. Lui qui a conjuré son statut de cancre en décrochant deux CAP et un brevet professionnel consacre aujourd’hui la voie diplômante : « Face au manque de main-d’œuvre, il y a deux solutions : débaucher ou former ! Alors nous avons décidé d’ouvrir notre propre centre de formation. Dès la première année, nous avons reçu deux-cent-cinquante CV pour trentecinq places ! » Dans l’école Sabeko, c’est aussi grâce à des cours de théâtre que les aspirants plombiers parviennent à vaincre leur timidité. En ouvrant les vannes de la parole, ils maîtrisent l’essentiel d’un métier réclamant un contact direct avec le client : « Ce projet a tellement bien fonctionné que la troupe professionnelle avec qui nous travaillons a monté un spectacle co-écrit avec nos apprentis ! » Ce n’est pas Benjamin qui contredira le pouvoir de cet art, puisque le dirigeant se plaît à son tour à narguer son tempérament prévoyant lors de cours d’improvisation. Celui qui a déjà suivi ses équipes pour réalimenter cinq barres d’immeubles, dont les sous-sols étaient partis en fumée, continue donc à se produire sur d’autres scènes sans filet. Et par-delà les imprévus, les coups de mou et les quelques coups durs, ce sont toujours les petites victoires que l’optimiste savoure. La fidélité d’un collaborateur, la création d’une série télévisée qui valorise leur cœur de métier. Les chantiers immenses décrochés après des tractations épiques puis tous les autres qui se mettront sur pied grâce aux idées et à l’impulsion des équipes. Sans oublier ce qui vibre au fond de lui ; cette volonté sur laquelle Benjamin veille au quotidien : « Faire quelque chose d’honnête, faire quelque chose de bien. »
Entreprendre ?
C’est ne jamais savoir ce qui nous attend ! On est dans la nouveauté permanente et j’adore,cela ! Un jour, on est dans une exaltation extrême parce qu’un client nous fait un retour,sensationnel, et le jour d’après, on peut se demander si le jeu en vaut vraiment la chandelle,à cause d’un pépin de chantier. L’entrepreneuriat, c’est aussi cette nécessité de,prendre la,vie du bon côté : plutôt que sur l’arbre qui tombe, j’ai toujours préféré me concentrer sur,la forêt qui pousse !